J’accompagne de plus en plus de personnes en arrêt maladie de longue durée  (burnout, cancer, infarctus, accident de la route, dépression, etc.). Quand je vois ces personnes, elles sont souvent guéries, en apparence, le travail et le cheminement de la guérison ont été faits, pourtant elles ont toujours la peur au ventre.  

Homme ou femme, ils appréhendent de retourner au travail. A raison car le retour est parfois très douloureux…  à tel point qu’à plusieurs reprises, j’ai pu observer de sévères rechutes.

Je pense en particulier à 3 cas rencontrés en consultation, des femmes, mais cela aurait pu être des hommes, des histoires qui illustrent bien ce difficile retour au travail.

A force de « paraître », elle s’est effondrée

retourner au travail

Une femme, qui à la suite d’une agression dans son agence avait craquée et s’était retrouvée en arrêt maladie, est retournée au travail. Pendant quelques temps, après son retour, son équilibre était stable, mais finalement elle n’a pas tenu.

La raison de ce burnout est que cette femme a tellement voulu que personne ne remarque qu’elle n’allait pas bien, qu’à force de « paraître », elle s’est effondrée.

Aujourd’hui heureusement, elle s’est reconstruite, ose ressortir de chez elle, fait des activités pour elle, se ressent vivre, mais la peur de retourner au travail reste.  La peur de retomber dans les mêmes travers, le même piège. 

En faire toujours plus pour rester dans la course.

L’autre personne est une dame de 50 ans qui s’est fait dépasser par un jeune homme qui jouait des coudes pour réussir.  Elle pensait devoir toujours en faire plus et un matin elle n’a plus assuré.  Elle est tombée malade. 

Du temps est passé et cette semaine, nouvelle tentative, elle doit reprendre son activité. Mais cela est trop difficile, elle demande une nouvelle prolongation de son arrêt maladie à son médecin généraliste.

Avoir envie de passer à autre chose après une épreuve

Une dame de 54 ans, qui à la suite d’un cancer du sein doit réintégrer son travail dans un service juridique d’une entreprise de transport.  Elle me dit avoir tellement bien pu se ressourcer lors de son congé de maladie (elle avait des séances de radiothérapie tous les matins).  Elle s’est organisée dans différentes activités.  Elle a pris goût aux loisirs, et n’a plus envie de retourner dans cet « enfer » comme elle me dit.

65 % des personnes qui retournent au travail après une absence de longue durée, rechutent dans les 3 mois

Toutes les trois ont, lors de leur congé de maladie, fait le point sur leur vie, se sont remises en question, ont pris du recul par rapport à ce qui leur est arrivé.

Mais voilà, aucune de ces trois femmes ne souhaite reprendre le travail.  Leur médecin les sentant encore fragiles, il les a prolongées de quinze jours et puis encore quinze jours. Comme si, pour ces femmes, quelque chose avait été rompu, cassé à jamais…

Plus de 65 % des personnes qui retournent au travail après une absence de longue durée, rechute dans les 3 mois, (et ce, malgré les mi-temps thérapeutiques adaptés) faute d’avoir été préparés à leur retour, malgré les conséquences économiques que cela peut avoir, tant pour le salarié que pour l’entreprise et la collectivité.

Travailler avec l’équipe, le retour d’un collaborateur

Il est important  d’autonomiser la personne lors de son retour en entreprise :

  • En l’aidant à une prise de conscience de la richesse de sa vie intérieure

  • En lui permettant de retrouver le chemin de l’estime de soi

  • En lui apprenant à convertir ses propres fragilités en forces effectives tant pour soi que pour autrui.

Il est important aussi de travailler avec l’équipe pour voir comment l’équipe va accueillir la personne à son retour. Souvent, la personne qui a été absente, a peur du regard des autres.  Accueillir la personne pour lui apporter un cadre de sécurité lui permettra de bien la réintégrer dans son poste et dans l’activité de l’entreprise.

Souvent les changements dans l’entreprise sont tellement rapides que les personnes ressentent que tout a changé à leur retour.  Plus le même chef, plus les mêmes responsabilités, plus les mêmes collègues, plus le même lieu… Ils ne reconnaissent plus leur entreprise. Le retour est alors ressenti comme un réel investissement de redémarrage.

Faire table rase du passé

Finalement, l’une de ces trois femmes a finalement réintégré son service et son patron l’a reçue. Il s’est voulu rassurant dans son propos, en lui disant de "faire à son rythme. que si elle ne fini le soir, elle le fera plus tard". Très bien mais concrètement, personne n’a traité ses dossiers ni même ouvert sa messagerie durant ses 6 mois d’absence, où elle a découvert plus de mille e-mails et tout paraissait urgent. Ce ne serait pas problématique pour quelqu’un de superficiel, qui s’en fiche, mais cette dame est consciencieuse, rigoureuse et responsable. Il faut être capable de gérer tant de matière et d’assumer ça ! Je lui ai conseillé de faire table rase du passé, d’effacer tout ça d’un bloc, considérant que si certains e-mails étaient importants, leurs auteurs se re-manifesteraient. 

Il faut parfois privilégier la manière forte pour avancer, plutôt que de bloquer et stagner !

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